Publié en février dernier, le rapport « La propriété des terres agricoles en France » du mouvement Terre de Liens montre combien les logiques à l’œuvre parmi les propriétaires peuvent favoriser ou freiner le besoin désormais urgent d’une évolution rapide vers l’agroécologie et l’installation d’une nouvelle génération d’agriculteurs et d’agricultrices.
L’étude commanditée par Terre de Liens [1] sur la propriété des terres agricoles [2] est la première en trente ans à l’échelle nationale. Depuis des décennies, le sujet est en effet un angle mort des politiques publiques nationales, sinon un tabou. La dernière en date, celle du ministère de l’Agriculture, date de 1992. Et les fichiers du cadastre sur les propriétaires sont largement confidentiels. Cette opacité empêche de mobiliser les propriétaires privés et masque des évolutions structurelles inquiétantes.
Pourtant ces derniers jouent un rôle majeur pour déterminer les usages des terres agricoles : ils peuvent décider de confier leur terre à un agriculteur, la laisser à l’abandon ou privilégier un usage plus rémunérateur que le fermage. Lorsqu’ils la confient à un agriculteur, ils peuvent se tourner vers quelqu’un du village ou donner sa chance à un nouveau venu. Ils peuvent aussi choisir les modalités de mise à disposition de la terre (vente, location) et proposer des conditions plus ou moins favorables (en termes de prix, durée, etc.) dans le cadre des limites posées par la loi.
Aujourd’hui, l’immense majorité des terres agricoles est dans les mains de plus de quatre millions de petits propriétaires privés, pour beaucoup âgés. Dans dix à quinze ans, la propriété sera encore plus morcelée et complexe, avec de nombreuses indivisions et un éloignement géographique et social croissant entre propriétaires et agriculteurs.
En parallèle, un nouveau groupe de propriétaires a fait son apparition depuis deux décennies : les sociétés agricoles, dont certaines sont financiarisées. Sans une connaissance fine de la structure du foncier et des profils des propriétaires, impossible de les inciter à s’emparer des enjeux collectifs au cœur de notre société : alimentation, emploi, climat et biodiversité… qui vont bien au-delà des enjeux de propriété individuelle.
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