Lancement du nouveau chantier du Comité technique « Foncier et développement »
Dans la continuité de ses travaux sur la formalisation des droits, le Comité technique « Foncier et développement » de la coopération française a organisé le 17 septembre dernier une première réunion consacrée à la question des communs, définie par les membres comme un thème prioritaire de réflexion collective pour les trois prochaines années.
Cette première journée a permis d’initier une réflexion qui prendra la forme d’un chantier collectif, sur un sujet d’actualité qui dépasse la seule dimension foncière. L’objectif est de construire un cadre analytique et opérationnel susceptible d’être appliqué aux territoires présentant des caractéristiques de « communs » (forêt, espaces pastoraux, etc.), et sur lesquels les opérateurs de développement assistent à une individualisation croissante de l’accès, l’usage et la gestion des ressources.
Etienne Le Roy, professeur d’anthropologie du droit, a introduit le sujet en rappelant que les communs restent difficiles à appréhender, à observer de manière concrète, et que leurs spécificités varient en fonction des époques et des territoires. Un éclairage conceptuel est proposé, à travers trois angles d’approche :
1/ La propriété : les régimes de communs ne relèvent pas de régimes de propriété, qu’ils soient privés ou publics. Ce sont des modes d’appropriation originaux qui privilégient l’usage (« approprié à ») plutôt que le bénéficiaire (« approprié par ») tout en devant trouver un équilibre entre l’usage et le bénéficiaire par des règles de gestion élaborées entre tous les participants.
2/ Le partage : le partage est le principe de base qui fonde de nombreuses communautés. C’est un principe universel dont les modalités varient d’un contexte à l’autre. « Les communs, ce sont des ressources plus une communauté définie et des protocoles, valeurs et normes inventés par cette communauté pour gérer ces ressources » (David Bollier, 2013, 179) en vue de faire commun ou « faire société ».
3/ Le politique : nos sociétés ont construit des politiques en écartant la notion de commun. Mais la crise de l’Etat, du marché et de l’individualisme oblige à réinventer ces politiques, et pose la question des néo-communs.
Pour commencer à appréhender la grande diversité des situations, trois études de cas ont été présentées et ont permis d’aborder les enjeux opérationnels relatifs à la prise en compte des communs dans différents contextes :
1/ La gestion des forêts dans la commune de Mindourou au Cameroun, par Laurence Boutinot, Philippe Karpe et Olivier Iyebi Mandjek, du Cirad, et de la Fondation Paul Ango Ela ;
2/ L’expérimentation de l’intégration des communs dans les procédures locales de gestion territoriale dans la vallée du fleuve Sénégal, par Patrick D’Aquino de l’UMR Green du CIRAD ;
3/ La gestion locale sécurisée (Gelose) à Madagascar, à travers les travaux de l’UMR Green par Martine Antona ;
Des éclairages complémentaires sur les dimensions économiques et socio-politiques des communs ont ensuite été apportés par Michel Merlet (Agter) et Philippe Lavigne Delville (IRD).
Certaines questions s’imposent déjà comme structurantes pour la suite des réflexions :
- Qu’est-ce les sociétés veulent ou ont intérêt à garder en partage, afin de préserver les ressources, assurer la survie de la communauté, et celle des générations futures ?
- Quels arrangements locaux sont/peuvent être mis en place pour réguler l’accès à ces ressources ? A quelle représentation de l’espace répondent-ils ? Selon quel processus sont-ils produits ?
- Quelles relations entretiennent les différents groupes concernés ? Comment créer les conditions d’une gouvernance inclusive des ressources naturelles, dans des contextes souvent compétitifs ?
- En quoi l’analyse économique permet-elle d’éclairer les dynamiques d’évolution des communs (appropriation de la rente foncière, fiscalité, etc.)?
- En quoi les législations fragilisent-elles ou peuvent-elles accompagner l’évolution des communs ?
L’intervention du Professeur Etienne Leroy sera publiée sur le portail, et les échanges de cette journée feront l’objet d’une note de synthèse (note de synthèse n°19), à paraître au cours du mois de novembre. Un groupe d’animateurs sera prochainement recruté pour organiser et animer la réflexion collective. Parallèlement, un groupe de référents sera constitué au sein du Comité avec pour fonction d’accompagner les animateurs et veiller à la cohérence des activités proposées par rapport aux finalités attendues du chantier.
Ces premières réflexions alimenteront la contribution envisagée du CTFD à la session « communs tenure for a common future » du Global Landscape Forum les 5 et 6 Décembre prochains en marge de la COP 21.
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