Le texte, voté en juin 2021, propose la refonte de la loi de 2006 sur la propriété foncière. Si cette dernière avait été considérée à l’époque comme une avancée majeure pour le paysannat en offrant au plus grand nombre la possibilité de protéger légalement son terrain, la nouvelle loi est vécue comme un véritable recul par les organisations de défense des droits des paysans.
« Cette loi bafoue et viole et remet en cause tous les acquis de la réforme foncière des années 2005 et 2006 », tonne Gérard Andriamandimby, le directeur du réseau SOA, le Syndicat des organisations agricoles. Le changement majeur de cette nouvelle loi 2021-016, c’est le coup porté au certificat foncier. Ce document légal, instauré en 2006 et délivré par le guichet foncier dans les communes, ne pourra désormais être remis qu’aux personnes qui ont mis en valeur leur terre pendant plus de quinze ans et avant 2006.
La loi impose donc au reste des citoyens de recourir au titre foncier, un document souvent inaccessible dans la pratique car extrêmement compliqué à obtenir, explique Gérard Andriamandimby, directeur du réseau SOA, le Syndicat des organisations agricoles, signataire de la lettre adressée au président de la République : « Il y a 21 ou 23 étapes à suivre, cela se fait sur une dizaine d’années, c’est très centralisé, les services ne se trouvent pas dans tous les districts de Madagascar. Et aussi, le titre foncier, c’est extrêmement coûteux (environ 600 euros contre 10 à 15 euros pour le certificat). Ça représente le salaire de deux années de travail. Donc supprimer l’accès au certificat foncier, c’est enlever définitivement la possibilité à des millions de paysans d’avoir accès un jour à un document officiel de propriété foncière. »
En 2021, seize ans après la réforme, 520 000 certificats fonciers ont été émis au travers des guichets fonciers communaux et 300 000 dossiers sont en cours de traitement. Un chiffre conséquent au regard du nombre de titres fonciers – estimés à 600 000 – délivrés sur un siècle.
La crainte des expulsions ou d’un accaparement des terres
Autre déflagration pour les associations agricoles, la réappropriation de la gestion du territoire par l’administration centrale. Avec des règles qui semblent desservir les plus pauvres, soit la majorité de la population. « Si une société minière débarque ou un projet présidentiel ou d’État sur mon terrain, si moi je n’ai pas les documents de certificat foncier ou titre, on peut m’enlever du jour au lendemain mon terrain sans aucune indemnisation. Et je perds tout le travail que j’ai investi pendant plusieurs années », ajoute Gérard Andriamandimby.
Sur la Grande Île, pays profondément rural, 80% des ménages vivent de l’agriculture et 92% de la population vit avec moins de deux dollars par jour. L’accès à la terre constitue l’une des principales pierres angulaires du développement. La question foncière est donc centrale pour l’avenir du pays. Et reste un défi pour la société, au moment même où la pression sur les terres n’a jamais été aussi forte.
Source : RFI
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