Du 11 au 15 septembre 2023, les experts de l’Interface Science-Politique (SPI) de la CNULCD, se sont réunis à Montpellier dans le cadre d’un atelier de travail pour préparer les avis scientifiques qui nourriront les recommandations politiques lors de la prochaine Conférence des Parties (COP) de 2024. Cet atelier a constitué une opportunité pour le Comité Scientifique Français de la Désertification (CFSD), le Comité technique « Foncier & Développement » (CTFD) et le Pôle Foncier de Montpelier, d’organiser une journée de travail le 11 septembre pour débattre et échanger avec les membres du SPI sur les enjeux spécifiques relatifs au foncier.
La dégradation des terres des zones arides est un sujet de préoccupation internationale, et l’objectif de développement durable sur la neutralité des terres, un objectif central de la convention des Nations Unies sur la lutte contre la désertification. La mise à l’agenda de la neutralité en matière de dégradation des terres repose la question de la conciliation des enjeux de protection et d’amélioration des terres d’une part et de développement économique et social d’autre part.
La littérature institutionnelle consacre ainsi l’intérêt économique, social et environnemental des approches de la neutralité en matière de dégradation des terres en ce qu’elles permettraient de mettre en œuvre des « solutions fondées sur la nature » (production et régénération des écosystèmes) compatibles avec la satisfaction des besoins fondamentaux (eau, nourriture, énergie) des plus défavorisés et permettant de séquestrer du carbone dans le sol et dans la végétation. Ce sont les enjeux auxquels entendent répondre les différents programmes et projets de gestion durable des terres, de restauration des forêts et des terres dégradées ou les initiatives pour augmenter les stocks de carbone dans les sols.
Le consensus sur l’objectif de neutralité en matière de dégradation des terres tend néanmoins à masquer les réflexions autour des processus contrastés de transformation des terres au Sahel, entre phénomènes de dégradation et processus de reverdissement, et la question des échelles d’analyse de ces phénomènes. Il masque par ailleurs les effets d’exclusion que peuvent engendrer ces processus. L’atelier organisé par le CSFD, le CTFD et le Pôle foncier visait ainsi à faciliter les échanges sur les enjeux fonciers dans l’espace sahélo-soudanien entre des chercheurs spécialistes du foncier et de la désertification, des acteurs institutionnels et de la société civile.
La manière dont ces différentes approches, mécanismes et outils sont ou non contextualisés dans les espaces soudano-sahéliens ont été au cœur des réflexions de cette journée. Il s’est agit en particulier de questionner comment sont pris en compte la variabilité des ressources dans l’espace et dans le temps constitutive du climat sahélien, les évolutions contrastées en matière de dégradation des terres, le multi-usage des ressources et des espaces, la mobilité des animaux et des hommes, permise par le maintien en accès partagé des ressources, les crises alimentaires chroniques, et, à une échelle inédite depuis une décennie, la mobilisation des ressources foncières dans les conflits violents.
Après une introduction posant quelques préliminaires en termes de neutralité et de foncier, la journée s’est déclinée en trois sessions :
- Une première session permettant de mieux comprendre les enjeux fonciers et de neutralité en matière de dégradation des terres, avec : (i) Un cadrage scientifique qui a remis en perspective les processus locaux de sécurisation foncière et présenté les paradigmes en la matière dans les politiques publiques; (ii) Une mise en en regard du point de vue international à partir des travaux sur le foncier qui sont actuellement développés dans le cadre de la neutralité par les institutions CNULCD et FAO. Il s’est agit notamment de discuter les orientations et l’opérationnalisation du guide technique de la FAO sur la prise en compte du foncier dans la lutte contre la désertification et pour la neutralité des terres
- Une seconde session a permis de mettre en perspective les expériences du processus de décentralisation de la gestion des ressources naturelles en zone soudano-sahélienne sur un temps long en interrogeant la diversité et l’évolution des approches territoriales fondées sur la concertation ainsi que celles des outils fonciers mis en œuvre. Elle a porté sur la manière dont les questions environnementales sont débattues dans les arènes territoriales en lien avec la diversité des droits fonciers existants, des concurrences et des tensions autour des ressources naturelles, en interrogeant les éventuels processus d’exclusion.
- Une dernière session s’est interrogée sur les liens entre neutralité des terres et neutralité carbone en insistant plus particulièrement sur les systèmes de paiement pour services écologiques et climatiques, dont les crédits carbone.
Focus sur l’Interface Science-Politique (SPI) de la Convention des Nations Unies sur la Lutte Contre la Désertification (CNULCD) L’Interface Science-Politique (SPI) de la Convention des Nations Unies sur la Lutte Contre la Désertification (CNULCD) a été créée en 2013 lors de la COP11 pour promouvoir le dialogue entre les scientifiques et les décideurs politiques sur la désertification, la dégradation des terres et la sécheresse. Le SPI travaille pour fournir des informations, des connaissances et des conseils scientifiquement établis et politiquement pertinents pour élaborer des politiques et des mesures qui assurent l’entretien et la mise en valeur des terres et des ressources naturelles. Il identifie les besoins de connaissances, sélectionne les moyens pour acquérir ces connaissances et les traduit auprès des décideurs politiques. Les membres du SPI ont été renouvelé en 2017 lors de la COP13 et un nouveau renouvellement aura lieu en 2024 lors de la COP16. Le SPI est composé de :
Cette composition a pour objectif de fournir une vision scientifique indépendante de l’ensemble des disciplines pertinentes de la Convention, qui prend en compte les enjeux à une échelle régionale et internationale et les considération politiques. Le programme de travail du SPI est fixé par le Comité de la science et de la technologie (CST) de la CNULCD, un organe subsidiaire de la Conférence des Parties (COP) qui a pour but de fournir des informations et des conseils sur les questions scientifiques et technologiques liées à la lutte contre la désertification et à l’atténuation des effets de la sécheresse. Il est multidisciplinaire, ouvert à la participation de toutes les parties prenantes de la Convention et il se compose de représentants des gouvernements des États parties qui souhaitent y prendre part. Le travail du SPI vient nourrir les recommandations du CST énoncées lors des COP. Les thèmes principaux de ce programme pour la période 2022-2024 sont :
En savoir plus : https://www.unccd.int/sites/default/files/2022-07/SPI%20Work%20programme%202022-2024.pdf |
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