Dans le cadre de la nouvelle convention de financement du Comité, les ateliers de lancement des dispositifs d’appui aux réseaux d’acteurs stratégiques des politiques foncières en Afrique de l’Ouest et à Madagascar ont débuté. Au total les ateliers seront organisés dans huit pays : Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Guinée, Mali, Niger, Sénégal et Madagascar. Entre les mois de mars et juin, sous l’impulsion du Comité, et en lien avec des institutions partenaires dans chaque pays, quatre ateliers ont déjà été organisés en Guinée les 12 et 13 mars, au Sénégal le 29 avril, au Mali les 20 et 21 juin et au Burkina Faso les 24 et 25 juin 2019.
Ces ateliers poursuivent deux objectifs principaux et visent la mise en place d’activités définies et mises en œuvre par les acteurs eux-mêmes, avec le soutien financier et technique du CTFD, pour :
- Accompagner les acteurs stratégiques du changement des politiques foncières dans les pays à infléchir les débats, alimenter les réflexions ou accompagner la mise en œuvre des réformes foncières ;
- Faciliter la mise en réseau aux niveaux régional et international, afin de bénéficier de l’expérience et de l’expertise des autres pays et prendre du recul sur les manières dont sont posées les débats dans chaque pays.
A travers un dispositif volontairement souple, les initiatives qui seront appuyées peuvent comprendre des activités de production de connaissance, de capitalisation d’expérience, de plaidoyer, de communication, d’échange et de dialogue ou encore de renforcement des capacités.
Les processus d’organisation des ateliers ont été assez variable selon les pays, en fonction de l’état d’avancement des réformes, du niveau de dialogue entre organisations de la société civile et Etat, etc.
En Guinée, l’atelier a été co-organisé avec Acord Guinée et la Direction nationale du foncier rural du ministère de l’Agriculture. Il intervenait dans un contexte marqué par des réflexions multiples sur le foncier pour dépasser les incohérences du cadre juridique actuel, qui ne permet pas de reconnaître les droits fonciers locaux et l’émergence de synergies nouvelles entre acteurs notamment via la mise en place d’une plateforme nationale sur la gouvernance foncière en 2018. Des débats se sont tenus à travers plusieurs panels concernant : (i) les processus de réflexion engagés au sein des différents ministères concernés par les questions foncières ; (ii) les enjeux et pratiques de sécurisation foncière en milieu rural dans les différentes régions du pays ; (iii) les différentes dynamiques collectives en cours, portées notamment par les organisations de la société civile.
Les échanges ont permis de relancer le dialogue interministériel sur les questions stratégiques liées à la mise en cohérence des différentes initiatives sectorielles en cours sur le foncier, ainsi que la nécessité de mieux documenter et reconnaître les pratiques locales pour engager des réflexions sur une réforme du foncier agricole et rural. Des activités de capitalisation d’expériences, d’analyse et vulgarisation des textes législatifs et outils existants au niveau des quatre grandes régions naturelles puis au niveau national seront lancés rapidement.
Au Sénégal, la rencontre a été animée par le Conseil national de concertation et de coopération des ruraux (CNCR) et par Enda Pronat. Elle a réuni de nombreuses organisations de la société civile, membres du Cadre de réflexion et d’action sur le foncier au Sénégal (CRAFS). L’atelier s’est organisé dans un contexte d’incertitude quant à la poursuite du processus national de réforme lancé en 2012, et brutalement interrompu en 2017 avec la dissolution de la Commission Nationale de Réforme Foncière (CNRF).
Les discussions ont permis de mettre en exergue la nécessité de recréer une alliance forte entre organisations de la société civile et élus locaux autour des enjeux de gouvernance foncière locale pour obtenir des améliorations concrètes sur le terrain et parvenir à relancer le dialogue politique avec l’Etat du Sénégal autour de la poursuite d’un processus inclusif de réflexion sur les réformes à engager.
Au Mali, en lien avec la Coordination Nationale des Organisations Paysannes (CNOP), l’atelier s’est inscrit dans un contexte politique et sécuritaire tendu où les conflits violents se multiplient. Sur le plan juridique et institutionnel, les acteurs font face au défi de mise en œuvre de la Loi Foncière Agricole adoptée en 2017, et notamment de la mise en place des commissions foncières multi-acteurs et pluri-échelles et de l’Observatoire National du Foncier (ONF). Le processus de Réforme Domanial et Foncière (RDF) engagé en 2016 renforce également le besoin d’espaces de dialogue interinstitutionnels.
Les discussions ont porté sur : (i) les aménagements publics et les transferts fonciers marchands, et les questions liées à leur prise en compte dans la LFA ; (ii) la reconnaissance et caractérisation des droits et principes coutumiers ; et (iii) l’opérationnalisation des commissions foncières et de l’ONF. Les pistes de travail devraient s’orienter notamment vers une révision des modes de gestion de l’Office du Niger avec une approche multi-acteurs, une cartographie des us et coutumes avec une méthodologie et des objectifs communs, ainsi que vers l’appui à la mise en place des COFOS.
Au Burkina Faso, se sont mobilisés la Direction générale du Foncier, de la formation et de l’organisation du monde rural (DGFOMR), le Groupe de Recherche et d’Action sur le Foncier (GRAF) et la Confédération Paysanne du Faso (CPF). Dix ans après la promulgation de la loi 2009-034 portant sur le régime foncier rural, l’atelier a permis de mettre en avant un sentiment partagé d’insatisfaction quant à la mise en œuvre de la loi avec des points qui posent encore de nombreuses questions et défis : sur le foncier pastoral, les marchés fonciers ruraux et la persistance des conflits intrafamiliaux.
Une première plénière a permis de réaliser un bilan de la mise en œuvre de la Politique nationale de sécurisation foncière en milieu rural (PNSFMR) qui reconnait les droits coutumiers collectifs et individuels, puis des panels ont pu débattre du rôle de la PNSFMR et de la loi foncière de 2009 dans la régulation du foncier pastoral et des marchés fonciers en milieu rural. Des groupes de travail ont identifié des axes de travail prioritaires pour répondre à deux enjeux majeurs : créer les conditions d’une volonté politique et lier la loi foncière et l’aménagement du territoire aux niveaux national et communal.
- Les prochaines étapes
La dynamique impulsée dans ces quatre pays se poursuit, sous l’impulsion des organisations porteuses. Il s’agit maintenant des construire collectivement des propositions d’initiatives à mettre en place, qui devraient débuter au second semestre 2019. Le Comité pourra accompagner ces dynamiques en mobilisant, à la demande, un pool d’experts, personnes ressources qui pourraient se mobiliser pour suivre, accompagner et appuyer les initiatives. Le lancement des ateliers dans les quatre autres pays d’action prioritaire pour le Comité (Bénin, Côte d’Ivoire, Madagascar et Niger) est planifié pour le premier semestre 2020. A l’issue de ces différentes rencontres, il est également prévu d’organiser un atelier de partage régional en Afrique de l’ouest avec les représentants des huit pays.
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